Rechercher dans ce blog

jeudi 22 janvier 2015

La bactérie Xylella fastidiosa menace les vergers, les amandiers, les vignes et les oliviers du bassin méditerranéen

Dans le Salento, à l'extrême sud du talon de la botte italienne, l'agonie d'une oliveraie préfigure celle de l'agriculture locale. Le mal est visible sur près de 60 000 hectares. Il est l'oeuvre de Xylella fastidiosa, bactérie dévastatrice qui a trouvé dans les vergers de la province de Lecce un terrain propice à sa propagation. Quasiment la totalité des oliviers et autres végétaux y ont été infectés.

La bactérie provoque le dépérissement de quelque deux cents espèces végétales, comme l'olivier, le lierre, l'amandier, la vigne et le chêne. Elle se propage via le commerce de plants dits porteurs sains, par les plantes contaminées, ainsi que par l'intermédiaire d'insectes piqueurs-suceurs tels que la cicadelle. Une fois devenus les hôtes du parasite, certains arbres produisent des fruits de plus en plus petits, jusqu'à dépérir.


La facture est lourde


C'est en Californie que Xylella fastidiosa apparaît pour la première fois, en 1880. Tour à tour, plusieurs souches contaminées ont été détectées sur des espèces cultivées. La bactérie a le voyage facile. 29 États américains sont actuellement touchés. Et la Californie a été contrainte de procéder à l'arrachage de vignes. Par la suite, Taïwan et l'Amérique du Sud ont été en proie à la bactérie, avant qu'elle fasse son nid en Italie, où elle est détectée en octobre 2013. Dans les Pouilles, la facture est lourde : 53 millions d'euros de pertes pour l'agriculture locale.


Face à ce risque écologique, la Commission européenne a décidé de renforcer la surveillance et de mettre en oeuvre au plan européen des restrictions de mouvement des végétaux visant à prévenir l'extension du foyer. 


Cependant, cette peste menace désormais de s'étendre aux régions avoisinantes. Un "séisme" environnemental ? Pour Daniel Sainte-Beuve, expert en filières végétales, le mot n'est pas trop fort. En octobre dernier, ce scientifique de l'office du développement agricole et rural de la Corse s'est rendu à Gallipoli, dans les Pouilles, pour un symposium scientifique consacré à cette bactérie tueuse. Il a constaté avec effroi que les autorités italiennes, "démunies par rapport à l'enjeu", n'isolaient pas correctement les zones infectées.


La Corse en première ligne


Contacté par Le Point.fr, le scientifique explique que "contrairement à ce que préconise l'Europe, il n'y a pas de confinement de la bactérie dans les Pouilles. Une zone tampon de 30 000 hectares devait être mise en place dès 2014 afin d'isoler la bactérie dans cette région. Mais aujourd'hui encore, la situation n'est pas sous contrôle." Pour Daniel Sainte-Beuve, la mise en quarantaine de la zone se heurte au dogme européen de la libre circulation des biens et des personnes. Aux yeux du scientifique, cela ne fait aucun doute, "le bassin méditerranéen est menacé".


En première ligne : la Corse. Dans l'île, l'inquiétude grandit. La plupart des plants commercialisés proviennent d'Italie. À ce titre, les élus nationalistes de Femu a Corsica avaient tiré la sonnette d'alarme dès le mois d'août 2014. Avec le concours des chambres régionales d'agriculture, la surveillance a été renforcée dans l'île et des contrôles supplémentaires ont été réalisés sur les végétaux introduits par voie maritime et aéroportuaire. Des prélèvements sont également effectués à des fins d'analyse. À ce jour, aucune anomalie n'aurait été constatée. Pour autant, Daniel Sainte-Beuve estime que la Corse est "très exposée" et que les mesures prises sont "insuffisantes". D'autant que "des contrôles systématiques des plants ne peuvent pas être réalisés, car cela serait une entrave à la libre circulation."


L'insuffisance des pouvoirs publics


De nombreuses universités américaines, mais aussi celles de Turin et Bari, cherchent les meilleurs moyens de se débarrasser de la bactérie. En vain. De l'avis commun des scientifiques, "aucun moyen de lutte curative contre cette bactérie n'est aujourd'hui connu. L'éradication reste impossible sur un végétal infecté par Xylella fastidiosa, mais on peut penser que la bactérie atteindra une limite climatique, si elle progresse vers le nord de l'Europe." Pour l'heure, "la seule méthode de traitement possible serait d'utiliser des antibiotiques, affirme Daniel Sainte-Beuve. Or, pour des raisons environnementales et sanitaires, nous refusons d'utiliser des antibiotiques sur les végétaux."


Selon lui, les pouvoirs publics n'ont pas été à la hauteur de la menace. "La gestion politique de la crise est alarmante, dénonce-t-il. La moindre des choses serait de faire de la prévention, afin d'alerter les populations vis-à-vis de ce risque, car le vecteur humain reste le premier vecteur de propagation. Mais tous nos appels au ministère de l'Agriculture sont restés lettre morte."


Source © Julian Mattei / le point 




Source trouver:

Naturealerte

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire