Le document, que Barack Obama avait refusé de rendre public, a été révélé mardi 5 février par la chaîne NBC News. Cette publication intervient peu avant l’audition, jeudi, par le Sénat, de John Brennan, ordonnateur de la politique antiterroriste deBarack Obama, en vue de sa confirmation en tant que nouveau chef de la CIA. Onze sénateurs républicains et démocrates viennent d’ailleurs d’écrire à M. Obama pour réclamer la publication de l’ensemble des documents sur le sujet.
Sur seize pages rédigées par le ministère de la justice, sont développés les arguments juridiques censés donner une base légale à des exécutions ciblées par drone, telle que celle qui, le 30 septembre 2012, au Yémen, a visé Anouar Al-Aulaqi. Cet imam radical, citoyen des Etats-Unis et du Yémen, était le responsable de la branche yéménite d’Al-Qaida et considéré comme l’instigateur de plusieurs tueries.
LA NOTION DE “MENACE IMMINENTE” APPARAÎT TRÈS LARGE
Le document, intitulé “Légalité d’une opération meurtrière visant un citoyen américain haut responsable opérationnel d’Al-Qaida ou d’une de ses filiales”, fournit une définition extensive du “droit à l’autodéfense”, dont M. Brennan se prévaut publiquement.
Il tend à légaliser l’assassinat, dans le cas où “ un haut responsable informé” décide que la personne ciblée constitue “une menace imminente d’attaque violente contre les Etats-Unis”, à condition que la capture de cette personne soit “impossible” et que l’attaque soit menée conformément aux “lois ou principes de la guerre”.
La notion de “menace imminente” apparaît particulièrement large : la preuve de la préparation en cours d’une attaque n’est pas nécessaire si la personne visée est engagée dans des activités terroristes contre les Etats-Unis.
“CELA RÉSUME LA TOUTE-PUISSANCE STUPÉFIANTE DE L’EXÉCUTIF”
Le document rejette toute intervention d’une instance judiciaire pour contrôler pareilles décisions. Une telle vérification, allègue-t-il, reviendrait à faire contrôler par les juges une décision de l’exécutif visant à faire usage de la force contre un ennemi vis-à-vis duquel le recours à la force a précisément été autorisé par le Congrès.
Pareille légalisation d’exécutions extrajudiciaires de citoyens américains remplit d’effroi les organisations de défense des droits de l’homme. “Ce document est glaçant”, a commenté Jamel Jaafer, directeur juridique adjoint de l’American Civil Liberties Union (ACLU). “Le texte pose des limites au pouvoir qu’il instaure, mais elles sont élastiques et peuvent facilement être manipulées.” “Il est difficile de croire que cela a été rédigé dans une démocratie bâtie sur un système d’équilibre et de contrôle des pouvoirs. Il résume en des termes froids la toute-puissance stupéfiante de l’exécutif”, fulmine un autre responsable de l’organisation.
Pour la Maison Blanche, en revanche, qui a réagi mardi aux révélations de NBC News, les frappes de drones sont “nécessaires pour empêcher les menaces en cours, arrêter des projets d’attentats (…), et sauver des vies américaines”. Elles sont “légales, éthiques et sages”, a martelé Jay Carney, le porte-parole de la présidence.
UNE ÉTAPE DANS LA BATAILLE POUR LA TRANSPARENCE
La publication de la note du ministère de la justice – NBC l’a diffusée sur Internet – constitue aussi une étape dans la bataille pour la transparence que livrent les associations et la presse.
L’ACLU, le New York Times et le Centre pour la défense des droits constitutionnels ont attaqué en justice l’administration Obama pour obtenir la communication du document ayant justifié à ses yeux l’assassinat au Yémen d’Anouar Al-Aulaqi ainsi que celui, à présent divulgué, qui avait été communiqué à une commission spécialisée du Sénat. Un “mémo” selon lequel “un meurtre légal au titre de l’autodéfense n’est pas un assassinat”.
Source: Le Monde via État du monde état de l’être.
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