Les crèmes solaires protégent-elles efficacement ? Certains composants sont-ils dangereux ? Comment choisir une crème solaire ? Réponses avec l'association américaine EWG de protection des consommateurs. [Photo CC Chente922]
Pour son édition 2012, l'association américaine de protection des consommateurs EWG a étudié la composition de plus de 1800 crèmes solaires et autres produits affichant un indice de protection solaire (des laits hydratants ou des baumes pour les lèvres par exemple). Résultat : seul un produit sur 4 est considéré par l’association comme vraiment efficace et sans danger. L’association dénonce des indices de protection solaire exagérés (même chez les grandes marques) et l’usage trop fréquent d'une forme de vitamine A qu’elle considère comme un accélérateur potentiel des tumeurs de la peau (l'étude complète ici, en anglais).
Il faut noter que l’étude de EWG porte sur les seuls produits disponibles sur le marché américain, que la réglementation européenne autorise des substances chimiques encore interdites aux Etats-Unis et que de ce fait, toujours selon EWG, les crèmes solaires européennes sont potentiellement meilleures (voir notre encadré ci-dessous sur le sujet).
Néanmoins la base de données des substances chimiques présentes dans les crèmes, qui fait état de leurs dangers potentiels, peut être utilisée en Europe pour vous faire votre propre opinion sur votre crème habituelle. L'étiquette de votre produit en main, EWG, vous offre de vérifier, pour chaque ingrédient de votre crème solaire (et de manière générale pour tout cosmétique), sa dangerosité potentielle et les risques suspectés pour la santé. Cette base n'a, à notre connaissance, aucun équivalent dans le monde. Pour le reste, les recommandations générales et les risques particuliers à certaines formules sont valables dans le monde entier.
Depuis quatre ans, l’Environmental Working Group (EWG) fait pression sur les fabricants de crèmes solaires pour qu'ils en améliorent l'efficacité. Et pour cause : aux États-Unis, chaque année, près de deux millions de cancers de la peau sont diagnostiqués (le cancer le plus fréquent aux Etats-Unis). Lentement, la campagne du EWG commence à porter ses fruits, en particulier en ce qui conecrne la protection contre les UVA (selon l'association, de plus en plus d'études les considèrent comme plus dangereux que les UVB).
Principales recommandations (selon EWG)
La seule crème vraiment efficace et sans danger c'est un chapeau et une chemise à manche longue.
Ne pas utiliser de crèmes contenant une certaine forme de la vitamine A, le retinyl palmitate, qui favoriserait le cancer de la peau.
Eviter les crèmes contenant de l’Oxybenzone, un perturbateur hormonal et un allergène de la peau.
Préférer plutôt les crèmes contenant les ingrédients actifs suivant : oxyde de zinc, dioxyde de titane, Mexoryl SX, ou Avobenzone à 3%.
Utiliser des lotions plutôt que des sprays ou des poudres (sauf si vous aimez vous en mettre plein les poumons).
Les indices de protection élevés (supérieurs à 50) n’apportent que peu de bénéfices supplémentaires.
Les vérités qui dérangent
Efficacité - Parmi les conclusions de son étude, EWG cite la position de FDA (Food and Drug administration), l’instance gouvernementale qui autorise la commercialisation des aliments et des médicaments sur le territoire américain : "nous ne disposons pas de données montrant que les crèmes de protection solaire, utilisées seules, sont efficaces pour prévenir le cancer de la peau". Une position partagée par L'agence Internationale de la recherche contre le cancer (IARC), qui rappelle que la solution de choix reste dans le port de vêtements et chapeaux et l'usage de parasols.
Des études montrent cependant l'efficacité des crèmes solaires contre le carcinome à cellules squameuses, un cancer de la peau à développement lent (traitable par la chirurgie) et qui représente 16 % des cas de cancers de la peau (80% sont des carcinomes baso-cellulaires et 16% des mélanomes).
Une étude réalisée en Australie sur 10 années conclut toutefois que l'usage régulier (tous les jours) de crèmes solaires peut réduire l'apparition de mélanomes.
Efficacité encore. Notons toutefois l'ambiguité du terme "efficace". Il est établi que les crèmes solaires protègent des brûlures du soleil, encore appelées "coups de soleil". Mais la protection contre les coups de soleil pourrait inciter à rester davantage au soleil, et donc à s'exposer aux rayons ultra-violets qui eux ne brûlent pas mais infligent des dommages à la peau autrement plus subtiles... D'où les divergences de point de vue entre les experts du sujet.
Mélanomes - Certaines recherches montreraient que le risque de mélanome serait plus grand chez les utilisateurs de crèmes solaires. Sans toutefois expliquer clairement ce résultat, EWG suggère que les utilisateurs de crèmes solaires forment un groupe qui s'expose davantage au soleil (ce qui peut tomber sous le sens, NDLR), ou bien que les radicaux libres produits par l'action du rayonnement solaire sur les constituants chimiques des crèmes pourraient être mis en cause. L'association évoque aussi la prééminence sur le marché depuis 30 ans de crèmes à faible à faible pouvoir de protection réel.
Indice de protection - EWG remarque que le nombre de produits à fort indice de protection (50+) est plus élevé ( 1 sur 7 cette année) mais indique que rien ne prouve qu'ils sont plus efficaces. Elle rappelle qu'un indice de protection élevé peut à l'inverse inciter à rester au soleil plus longtemps, et que la protection contre les brûlures - avertissement ultime de la surexposition - peut à l'inverse encore augmenter les autres risques pour l'épiderme.
L'association rappelle que si le fait d’utiliser des écrans solaires dotés d'un indice de protection supérieurs à 50 donne l’envie de rester au soleil plus longtemps, sachez qu’elles ne bloquent les rayons solaires qu’à hauteur de 1 ou 2% de plus qu’une crème solaire à indice 30. Enfin EWG ne recommande cette année que 12 baumes à lèvres sur 128. Elle rappelle à bon entendeur que la plupart des cancers de la lèvre concernent la lèvre inférieure, celle qui est la plus exposée au soleil.
Différences européennes
EWG note que l'Europe autorise plus de substances actives que les Etats-Unis (27 contre 17). L'association ne précise pas pourquoi elles ne sont pas autorisées au U.S.A
Sept de ces substances autorisées en Europe sont des filtres UVA. EWG cite les Tinosorb S, Tinosorb M and Mexoryl SX qui seraient entre 3,8 et 5,1 fois plus efficaes que l'avobenzone, le filtre UVA le plus souvent utilisé aux U.S.A
Un peu de soleil quand même ? - EWG ajoute à la confusion en rappelant que trop peu de soleil peut aussi être dangereux. Elle rappelle la contribution du soleil à la production de vitamine D dont le rôle est important pour le squelette, le système immunitaire, et la prévention de certains cancers (colon, rein, prostate, sein, ovaire). Les experts semblent divergents sur les solutions. L'association médicale américaine (American Medical Association) recommande 10 minutes de soleil sans protection plusieurs fois par semaine. l'Académie américaine de dermatologie (American Academy of Dermatology) argue de son côté qu'il n'y pas de seuil d'exposition bénin.
L'ajout de vitamine A mis en cause - Selon EWG, des études récentes et des test effectués sur les animaux de la FDA (Food and Drug administration) montrent qu'un composant fréquemment utilisé dans les crèmes solaires, le retinyl palmitate (une forme de vitamine A), appelé encore retinol pourrait augmenter le développement du cancer de la peau lorque celle-ci est exposée au soleil. EWG indique que 25% des crèmes solaires testées contiennent ce composant. Les études sont en cours et doivent être approfondies, mais EWG conseille fortement de l'éviter. Ceci ne met pas en cause le retinol utilisé dans les crèmes anti-age, lorsque que la peau n'est pas exposée au soleil.
Radicaux libres - Selon EWG, le rayonnement solaire sur les ingrédients courants des crèmes solaires génère des radicaux libres qui peuvent endommager les cellules de la peau et favoriser l'apparition d'un cancer. Lorsque la crème solaire est appliquée en trop faible quantité ou pas assez fréquemment, l'effet radicaux libres serait plus dommageable que l'effet du soleil sur une peau non-protégée.
Faites votre choix : pertubateurs hormonaux ou nanomatériaux ?
EWG rappelle que la crème solaire idéale devrait arrêter les UV, être efficace pendant des heures, ne pas empoisonner la peau. Selon l'association, cette crème n'existe pas. Le consommateur doit choisir entre les crèmes chimiques, qui pénètrent plus ou moins dans la peau, et pertubre le système hormonal, ou les crèmes à la base de particules minérales (zinc ou titane) qui réfléchissent le soleil. Ces dernières contiennent souvent des nanomatériaux qui sont mis en cause par ailleurs (voir notre article sur une campagne des Amis de la Terre faite en 2010 - photo ci-contre). EWG, alarmiste sur ce point en 2010 est plus réservé aujourd'hui : "les nanoparticules ne semble pas pénétrer dans l'épiderme, mais certaines formes produisent des radicaux libres dangereux".
Précisons que l'intérêt des nanoparticules réside dans leur caractère invisible ; les crèmes minérales qui en contiennent ne laissent pas de dépôts blancs à la surface de la peau. En Europe, la mention [nano] est obligatoire à la suite de la mention de l'ingrédient utilisé sous la forme de nanoparticules.
EWG conseille les crèmes minérales. Elles sont stables dans le temps, ne pénètrent pas la peau et protègent contre les UVA contrairement à la plupart des crèmes chimiques. L'association condamne fermement les produits vendus enspray ou en poudre, du fait du risque d'inhalation.
Si on s'en tient aux crèmes chimiques, EWG recommande les crèmes à base de Ecamsule (nom commercial Mexoryl SX) ou à base de Tinosorb S et M. Ces produits sont plus stables sous l'effet du rayonnement solaire. Pour la protection contre les UVA l'association recommandent les crèmes solaires contenant de l'avobenzone (3% pour bonne protection) mais ne contenant de d'oxybenzone ou de 4-méthylbenzylidène camphre (4-MBC) qui sont des perturbateurs hormonaux notoires (l'oxybenzone est déconseillé formellement pour les enfants). L'oxybenzone est autorisé en Europe, mais sa présence dans les produits doit être mentionnée en clair (Contient de l'oxybenzone) sauf si sa concentration est inférieure à 0,5 % (Source Le Flacon).
Trouvez votre crème solaire
Bien sûr les crèmes répertoriées dans la base de l'EWG sont celles vendues sur le marché états-unien. Mais les plus grandes marques, qui sont internationales, sont également présentes en Europe (comme Clarins, Coppertone, Decleor, Eucerin, Elizabeth Arden, L'Occitane, Nivea, L'Oreal, Lancaster, La Roche-Posay, Roc, Lavera, Mustela ou Weleda). Attention toutefois, les noms des produits ne sont pas nécessairement les mêmes de ce côté de l'Atlantique et les formules peuvent être différentes pour des raisons de réglementation ou de culture. Mais vous pouvez le vérifier facilement.
Certes l'étude est en anglais, mais comme la quasi-totalité des substances mises en cause ont des noms qui font partie d'une nomenclature internationale (voir la liste des ingrédients sur l'étiquette de votre crème), et que la dangerosité des produits est matérialisée par des couleurs (vert= OK, jaune=attention, rouge=à éviter). On s'y retrouve plutôt bien même sans parler l'anglais.
Cliquez l'image ci-dessus pour vous rendre dans la base de données. Elle contient près de 1700 crèmes solaires, baumes pour les lèvres, crèmes de soin ou de beauté avec protection solaire. À droite de l'écran, à l'aides des menus déroulants, sélectionnez éventuellement la marque, et le type de produit (généralement Beach and sports sunscreens) et cliquez surGO. Le lien See all Sunscreens vous amènent directement vers la liste de tous les produits classée par ordre de résultat dans les tests (les meilleurs en premier). Cette liste est toutefois de peu d'utilité en France, sauf pour découvrir quelques bonnes marques dont vous n'auriez pas connaissance. Une fois dans la liste des résultats un clic sur un nom de crème solaire vous donne son évaluation par EWG et la liste des ingrédients de la crème.
Evaluez votre crème favorite
Tout ça est bien joli, mais vous n'avez pas forcément envie de changer de crème solaire. Rien ne vous empêche d'évaluer votre crème favorite. Il vous faut une bonne loupe pour lire la liste des ingrédients sur le tube, puis rendez vous sur la base de données Skin Deep de l'EWG qui répertorie tous les ingrédients, leur toxicité, et les effets possibles sur la santé. C'est un peu fastidieux, mais vous ne le ferez pas souvent (ci-dessous la fiche de l'oxybenzone - cliquez sur l'image pour la voir sur Skin Deep)
Comment bien vous protéger du soleil
En matière de prudence, rien de bien nouveau sous le soleil, mais il n'est jamais mauvais de rappeler quelques précautions de base.
Utilisez une protection solaire efficace. Pour cela, utilisez une crème avec un indice supérieur à SPF 30, et renouvelez votre tube de crème toutes les années.
Protégez bien les enfants. Ceux-ci sont plus sensibles au soleil que les adultes. Mettez-leur de la crème solaire, et exposez-les le moins possible en plein soleil (les coups de soleil de l'enfant sont les mélanomes de l'adulte, ndlr).
Préférez les crèmes minérales et, dans le doute, évitez celles contenant des nanoparticules. Elles laisseront un dépot blanc sur la peau, et alors ?
Évitez la tranche-horaire d’exposition 11h-16h. C’est durant ces heures que les rayons solaires sont à les plus forst.
Forcez sur la dose de crème solaire. Réappliquez-en régulièrement. Mettez-en particulièrement avant d’aller au soleil ou à la sortie de l’eau.
Évitez l’usage simultané de crème solaire et d’insecticides (crème anti-moustiques). Vous n’en avez pas besoin aux mêmes heures et de leur combinaison résulte une plus grande absorption cutanée de pesticides.
Surveillez l’indice UV donné par les services météo quand vous planifiez des activités à l’extérieur.
Éviter les séances de bronzage en cabine et les lampes bronzantes.
Surveillez les changements à la surface de votre peau. Rappelez-vous qu’il n'est pas nécessaire d'être bronzé pour être beau ; rien ne vaut un tein naturel ! Vous êtes celui ou celle qui connaissez le mieux votre peau ; examinez-la régulièrement, en prenant note des changements, des lésions ou des taches (faites des photos). Soyez extrêmement vigilants si vous avez déjà des taches de rousseur ou des grains de beauté. Attention à l’exposition au soleil, déconseillée lors de la prise de certains médicaments. Il faut également faire attention dans les cas d’antécédents cancéreux ou de terrains familiaux. Voyez un dermato une fois par an, si vous avez des grains de beauté.
Evitez totalement le soleil quand il est violent. Faites comme les japonaises, déplacez-vous avec une ombrelle, vous aurez l'air d'avoir 30 ans à 50. Recherchez l’ombre. Portez un t-shirt, un chapeau et des lunettes de soleil. En voiture, mettez une chemise à manche longue. Au bureau, près des fenêtres, protégez-vous.
Note sur les nanoparticules
Selon EWG, les crèmes sans nanoparticules de zinc et de titanium sont moins efficaces et contiennent plus de produits responsables des cancers, des malformations congénitales, ou des troubles de la fertilité. Par ailleurs les nanoparticules sont mises en causes et semblent poser des risques pour la santé (elles peuvent passser au travers de la peau). Voici la réponse du EWG : « Notre évaluation des crèmes solaires qui contiennent des nanoparticules de zinc et de titanium ne signifie en aucun cas que nous approuvons l’utilisation de toutes les variétés de nanoparticules. Des études montrent que les nanoparticules libérées dans l'environnement sont toxiques pour les poissons et la vie aquatique, et chez l'homme, elles peuvent provoquer des dommages aux organes vitaux si elles sont aborbées au travers de la peau, ou inhalées, ou avalées. [...] Cette inquiétude est d’autant plus vraie dans le cas des produits destinés aux enfants ou pour l’usage facial. [...] EWG déconseille vivement aux consommateurs les protections solaires à base minérale vendues sous forme de poudre ou en vaporisateur. EWG conseille également aux fabricants d’éviter l’utilisation des nanoparticules dans la fabrication de ces types de produits. » Source: EWG, 2011. Nanotechnology and Sunscreens
Pour en savoir plusEnvironmental Working Group
Which ? une association de consommateurs britanniques, avait procédé en 2009 à une étude comparable, avec des crèmes solaires disponibles en Europe. Toutefois la consultation de l’étude était payante. L'année dernière l'association indiquait qu'elle est en train de revoir ses procédures de tests de crèmes solaires et diffèrait jusqu'à nouvel ordre toute nouvelle publication sur le sujet. Cette année Which semble avoir jeté l'éponge.
Selon EWG, les crèmes sans nanoparticules de zinc et de titanium sont moins efficaces et contiennent plus de produits responsables des cancers, des malformations congénitales, ou des troubles de la fertilité. Par ailleurs les nanoparticules sont mises en causes et semblent poser des risques pour la santé (elles peuvent passser au travers de la peau). Voici la réponse du EWG : « Notre évaluation des crèmes solaires qui contiennent des nanoparticules de zinc et de titanium ne signifie en aucun cas que nous approuvons l’utilisation de toutes les variétés de nanoparticules. Des études montrent que les nanoparticules libérées dans l'environnement sont toxiques pour les poissons et la vie aquatique, et chez l'homme, elles peuvent provoquer des dommages aux organes vitaux si elles sont aborbées au travers de la peau, ou inhalées, ou avalées. [...] Cette inquiétude est d’autant plus vraie dans le cas des produits destinés aux enfants ou pour l’usage facial. [...] EWG déconseille vivement aux consommateurs les protections solaires à base minérale vendues sous forme de poudre ou en vaporisateur. EWG conseille également aux fabricants d’éviter l’utilisation des nanoparticules dans la fabrication de ces types de produits. » Source: EWG, 2011. Nanotechnology and Sunscreens
Pour en savoir plusEnvironmental Working Group
Which ? une association de consommateurs britanniques, avait procédé en 2009 à une étude comparable, avec des crèmes solaires disponibles en Europe. Toutefois la consultation de l’étude était payante. L'année dernière l'association indiquait qu'elle est en train de revoir ses procédures de tests de crèmes solaires et diffèrait jusqu'à nouvel ordre toute nouvelle publication sur le sujet. Cette année Which semble avoir jeté l'éponge.
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